Juin 2003
Depuis quelques jours j’errais
chez les bouquinistes et brocanteurs de la ville afin d’y trouver un roman
épuisé de Marcel Aymé. J’empruntai une rue
me paraissant inintéressante quand je découvris une petite bouquinerie ;
c’est ainsi que je fis la connaissance de Noirphanion, propriétaire des lieux.
Après que je lui eus expliqué pourquoi je cherchais tel roman et non un autre,
lui ayant aussi exprimé le souhait d’avoir son avis d’auteur (car il écrit), il
me proposa de revenir le lendemain après-midi. Je lui apportai donc les
premières pages d’un essai, rédigées de ma main avec le plus grand mal, sur
Marcel Aymé. Il m’invita à m’asseoir après quelques civilités.
« - J’ai lu les pages de
ton essai généalogique, j’aimerais … si tu me le permets, te faire deux ou
trois suggestions, ton texte est trop lourd !… me dit-il.
- Je me suis lancé dans
quelque chose d’assez difficile, pourtant je voudrais partager un savoir, et
ce, me servant du fait que Marcel Aymé se trouve être apparenté à ma
famille !
- Il faut l’aérer, tu parles
des laboureurs au 17e siècle, du Jura, de Marcel Aymé, des
francs-maçons, tu pourrais sauter deux lignes, placer un taquet … ou écrire sous
une autre forme ! »
Marcel Aymé se trouve être apparenté à ma famille par sa grand-mère paternelle, Anne Gay, elle est née le 6 octobre 1828 dans un village du Jura, Le Deschaux. Anne descend en ligne directe de Claude Gay, troisième fils de Jacques, dit honorable et de demoiselle Etiennette Courcenet ; moi-même, je descends du fils aîné Pierre (1662-1733) marchand-laboureur à Tassenières (Jura).
« - Ton travail est très intéressant, je te donne ici mon avis personnel. Comment as-tu obtenu de telles informations ? Poursuit Noirphanion.
- Quelques laboureurs sont
aussi marchands, comme mon ancêtre. Les actes notariés permettent parfois
d’obtenir une vue générale de l’exploitation. Jacques est dit propriétaire de
deux maisons à Tassenières, de champs et de prés, il a des outils de culture,
les grains nous renseignent sur ce qu’il cultive et produit, il a aussi du bétail.
A cette époque les revenus d’un laboureur étaient souvent complétés par
d’autres occupations ! Le laboureur est au sens strict le paysan qui peut
labourer, qui a donc un attelage.
- Le mot laboureur correspond
donc à des réalités très différentes selon les lieux, et aussi les périodes.
- Oui, et il participait à la
gestion de la communauté rurale, par exemple Nicolas Gay était greffier en la
justice en la terre et seigneurie de Tassenières en 1711 ; nous pouvons en
déduire qu’il savait écrire ! »
J’ai lu la biographie de Marcel Aymé, l’auteur n’est autre que Michel Lecureur[1], responsable de l’édition des œuvres de Marcel Aymé dans la Pléiade. Il écrit que Faustin Aymé[2], le père de l’écrivain, se signalait par des yeux bleus (comme mon grand-père René)… Faustin est né le 29 avril 1859 au Deschaux. Il fut brigadier maître maréchal-ferrant au premier régiment de Dragons, vécut à Gray, Lure et Joigny. Auparavant il avait appris le métier de la forge. Très tôt il a manifesté le souhait de quitter la terre sur laquelle son père Jean-François peinait pour élever ses enfants ; d’ailleurs ce dernier est décédé à quarante-cinq ans seulement.
Faustin Aymé fut initié à la franc-maçonnerie en octobre 1904 au Grand Orient de France, il en restera membre jusqu’à sa mort ! Michel Lecureur écrit en page 25 de la biographie : « L’entrée en maçonnerie de Faustin fut déterminante pour la suite de son existence. » Emma, la mère de Marcel, est décédée le 18 juillet 1904 à Tours des suites d’une insolation. Marcel Aymé a beaucoup hérité dans son physique des Monamy.
Le grand-père maternel de Marcel Aymé était aussi anticlérical, Auguste Monamy a été propriétaire d’une tuilerie, d’une ferme et d’un moulin à Villers-Robert (Jura), il avait épousé Marie-Françoise Curie. Au sujet de Villers-Robert, Marcel raconte dans « Les jours », que quand il connut la tuilerie, cette dernière était sur son déclin, il ne devait rester que trois ou quatre employés.
Ces Monamy ont certainement un lien avec ceux qui figurent dans ma lignée ascendante, car le père d’Auguste, Pierre Monamy, est né le 3 octobre 1814 à Tassenières, il était aussi tuilier. Marié en 1836 avec une demoiselle Richard, il décède en août 1837.
L’habitude est prise, je me
rends chaque après-midi à la bouquinerie, les discussions avec Noirphanion sont
des plus enrichissantes ; aussitôt franchi la porte, je cours plonger les
mains dans un carton quand il m’annonce :
« - J’ai les Jules Romains, il doit y avoir le tome 7 des hommes de bonne volonté où il est question de la franc-maçonnerie[3].
- Enfin je le tiens !
Combien je te dois ?
- 6 euros. Il fallait avoir un
esprit révolutionnaire pour être admis en maçonnerie ! Ajoute Noirphanion.
- Aujourd’hui la
franc-maçonnerie n’est plus aussi secrète, j’ai consulté le site du Grand
Orient de France sur Internet, l’obédience à laquelle appartenait Faustin… Les
francs-maçons de Tours connaissaient les idées avancées du père Aymé, ce sont
eux qui l’ont contacté ! Ce qui m’attire c’est le côté initiatique.
- Jules Grévy aussi était
maçon ! … »
Marcel Aymé est né le 29 mars 1902 à Joigny (89), baptisé le 8 mai 1910 à Dole, il avait alors huit ans, c’est sa grand-mère Marie-Françoise, après le décès d’Auguste Monamy, qui prit cette initiative en raison de sa foi. Marcel épouse à Paris le 16 avril 1931 Marie-Antoinette Arnaud.
Parmi les œuvres de Marcel, je préfère les romans dits de la province, par exemple « La Table-aux-Crevés », « Gustalin », ou encore « La Vouivre ». Grand-père René était le contemporain de Marcel, sept générations les séparent de l’auteur, ce qui fait d’eux de lointains cousins. (L’auteur est l’ancêtre à partir duquel on recherche les descendants, ici il s’agit de Jacques Gay).
Noirphanion n’a fait aucune allusion au chapitre où je relate le duel de Philibert, cet événement semble ne pas l’avoir marqué au moment de sa lecture des pages brouillons de mon essai ; pour moi c’est plutôt l’inverse, plus que la présence de M. Aymé dans les branches de mon arbre généalogique !
Un petit village, Tassenières, le cimetière entoure l’église. Philibert Courcenet, cousin de Nicolas Gay, le greffier, était docteur en droit et avocat au Parlement. En 1719, une rémission lui est accordée par le roi Louis XV[4], à l’occasion de la mort du sieur Benoît Picolet, tué en défense légitime par l’avocat Ph. Courcenet à Tassenières, un dimanche à la sortie des vêpres le 17 juin 1719. Nicolas Gay, mon aïeul, Antoine-Joseph Gay, celui de Marcel Aymé par sa grand-mère, en furent-ils témoins ? Ce serait possible, vu qu’ils habitaient Tassenières et étaient de la même génération, cousins germains.
On m’avait proposé de rédiger l’essai sous la forme d’un récit, je voyagerais dans le temps à l’aide d’une machine, je relaterais le vécu de chacun à mon retour, comme si j’en eusse été témoin ! Je n’ai pas ce talent … et je n’ai pas besoin de machine ! Pour moi c’est une véritable passion que de rechercher tout ce qui peut être un reflet hors du temps. Comme l’écrit si bien une poétesse[5] « il y a quelque chose qui se perpétue. Mystérieux cheminement de l’esprit. ». Je suis certain que ce qui n’est plus vivant le devient à nouveau, même si ce n’est qu’un bref instant, par une signature au bas d’un document ancien, d’une photographie usée, au travers des grains d’un vieux rosaire, c’est ce que j’entends dans ses vers.
« - Tu connais mes idées
là-dessus ! » me dirait Noirphanion.
Pour en revenir à l’histoire du duel, celle-ci est citée dans un essai de généalogie de la famille Courcenet (1913), l’auteur en est Louis-Claudius Courcenet. L’avocat Philibert était marié à demoiselle Claudia Dauphin. Il décède le 10 octobre 1739 à l’âge de 56 ans.
Nous portons en chacun de nous (je parle pour ma famille) un peu de tous, de l’honorable Jacques Gay, certainement aussi de Nicolas, le greffier, inhumé dans l’église de Tassenières, et du très lointain Jehan Courcenet dont nous ne savons rien si ce n’est, par une signature sur un acte notarié, qu’il hérita en 1612 de Catherin Courcenet.
Marcel Aymé repose au cimetière Saint-Vincent dans le 18e arrondissement, je m’y suis promené lors de mon séjour à Paris, j’ignorais alors ce qui me liait à Faustin et Marcel Aymé.
« - Ta famille me paraît
tout de même réactionnaire, attachée au parti de l’ordre !
- Oui, Noirphanion, mais
remarque que l’anarchisme n’a pas donné de résultats bien brillants, des
attentats perpétrés par des illuminés !
- Il ne faut pas se voiler la
face, il fallait au siècle dernier répondre à la violence par la
violence ! Surenchérit Noirphanion.
- Alors au 21e
siècle vous êtes la tendance dernier cri rousseauiste ? La
franc-maçonnerie, elle, a eu un rôle décisif durant la Troisième
République !
- Il ne peut y avoir
d’anarchiste digne de ce nom en maçonnerie ! Elisée
Reclus[6] y est passé, il n’est
pas resté !! » me répond Noirphanion.
Mais faisons un court détour par le 19e siècle qui expliquera la réaction du bouquiniste.
Alors qu’Anne Gay épouse en 1843 au Deschaux Jean-François Aymé, mon trisaïeul Claude Gay est militaire dans un régiment de lanciers et libéré en 1847 avec le grade de Brigadier. Il est déclaré être cultivateur sur son acte de mariage à Tassenières ; il était le petit-neveu des grands-parents de son épouse Marie Duvillay. Quand la révolution de février 48 éclata, il n’y avait pas en France de parti bonapartiste, mais les amis du prince Louis-Napoléon commencèrent à faire une propagande active jusque parmi les ouvriers, le neveu du grand empereur représentait le parti de l’ordre ; il fut élu président de la république le 10 décembre 1848.
Claude Gay s’engage dans la gendarmerie en 1851, après avoir prêté serment devant le tribunal de Pontarlier il est actif dix-huit ans à Levier et à Maîche (Doubs), c’est-à-dire tout au long du Second Empire ; il achève sa carrière en 1869 avec le grade de maréchal des logis et plusieurs décorations militaires. Marie-Claudine Gay[7], sa mère, mentionne ses trois filles et son unique fils Claude sur son testament, elle fait suivre le prénom de ce dernier par : gendarme impérial, ce qui veut dire qu’elle en était certainement très fière. Mon trisaïeul repose depuis le 23 juin 1892 dans le caveau de famille à Fraisans (Jura). Il existe aux archives militaires du château de Vincennes une lettre manuscrite de sa veuve, Marie Duvillay, envoyée au ministère des armées pour l’obtention d’une pension ; Marie disparaîtra le 25 septembre de la même année.
« - Tu dois t’émanciper
de toute tutelle, sois individualiste, humain, peu importe si Dieu existe ou
pas, fais ta révolution … tant qu’il y aura des religions il y aura des
guerres, décapitons Dieu s’il existe ! Noirphanion a parlé.
- La franc-maçonnerie ayant comme objets essentiels la
recherche de la vérité et le perfectionnement de l’humanité ne peut avoir pour
fondement que la liberté de conscience, de croyance, de pensée ; cet
article me suffit ! »
Nous trouvons beaucoup de traces de catholicité dans les documents concernant nos ancêtres et leur histoire. Etiennette Courcenet a été baptisée le 8 mars 1641 à Dole, alors que les Courcenet possédaient une grande partie des terres de Bretenières (Jura). Pourquoi à Dole ? Peut-être du fait que Dominique son père était procureur d’office. Dépendait-il de Dole qui a été longtemps la capitale de la Franche-Comté et le siège du Parlement ? L’acte de baptême est rédigé en latin. Pierre Gay, le fils aîné de Jacques et d’Etiennette, est inhumé dans l’église, près de la chapelle du Saint-Rosaire (13 avril 1733), la dalle n’est plus visible malheureusement, la chapelle a été carrelée au cours du 19e siècle, à ce jour il ne reste plus que l’indication manuscrite du curé sur l’acte de décès, rédigé en français. Je me souviens avoir visité l’église de Tassenières une première fois en 1974, j’ai pu y découvrir dans les allées plusieurs inscriptions funéraires des familles Courcenet, Gay, Grévy, certaines très usées par les passages répétés des fidèles. « Il est des présences si vivantes qu’elles débordent la réalité de tous les jours » comme l’écrit si justement notre poétesse !
« - Tu as beaucoup de
livres chez toi ? me demande Noirphanion.
- Une vingtaine, pas plus, je
me rends très souvent à la bibliothèque municipale, je garde peu de livres, à
qui cèderai-je ma bibliothèque ?
- Tu peux en consulter ici si
tu as besoin de références pour ton essai … c’est entre nous bien sûr !
- Je cherche toujours
« Le vaurien » de Marcel Aymé et le volume 14 des hommes de bonne
volonté de Jules romains.
- Je te fais cadeau de cette
biographie de Chateaubriand, mais ces deux revues maçonniques, « la chaîne
d’union »[8],
je te les prête seulement, elles valent cher, je sais que tu en prendras grand
soin… tiens !
Bien des lois de la république ont été étudiées en loge, par exemple l’enseignement primaire obligatoire, laïque et gratuit (28 mars 1882), le développement des caisses de retraite pour la vieillesse (20 juillet 1886), l’assistance judiciaire etc.[9]
Lorsque Faustin Aymé fut retraité de l’armée en 1909, il trouva une place de régisseur au château de Launay à Reugny, propriété du conseiller général V. Lefébure, et vénérable[10] de la loge maçonnique où il avait été admis.
Charles-Henri, mon arrière-grand-père, avait un frère aîné, Louis-Alfred, né le 27 mars 1851 à Tassenières, nous savons très peu de choses à son sujet, sinon qu’il a été employé aux contributions indirectes de Nancy, profession déclarée sur l’acte de décès de sa mère Marie Duvillay. Etait-il marié ? Où est-il décédé ? Il reste une énigme. Il faut bien laisser un peu de mystère pour ceux qui chercheront à leur tour plus tard !
Faustin épouse le 18 février 1886 à Villers-Robert Emma Monamy ; Charles-Henri, quant à lui, épouse le 18 février 1893 à Tassenières Marie-Philippine Poussot, sa cousine germaine. Et quand en 1904 Faustin entre au Grand Orient, mon arrière-grand-père est comptable à Besançon. Il a alors quatre enfants : Alphonsine et Henriette, René et Alfred, qui fréquenteront l’école catholique. Faustin Aymé quittera Reugny pour Ris-Orangis en 1940. Là, nous entrons dans une autre époque !
Gay Jacques, dit
honorable, marchand laboureur à Tassenières
x vers 1660
Courcenet Etiennette b. 8 mars
1641 Dole
Gay Pierre Gay
Philibert Gay Claude Gay
Catherine
° vers 1662 x x 1 août 1691 x 8 mai 1692
+ 13 avril 1733 Leculier Jeanne
Millot Cl. Françoise Curie
Bonaventure
x 5 janvier 1683
Roussey Clauda
Gay Nicolas Gay Antoine Gay Antoine Joseph
° 30 nov. 1687 x 13 juin 1719 x 21 janvier 1716 Tassenières
+ 8 mars 1761 Digonaux Rémye
Guérillot Antoinette
x 18 août 1711
Gallot Anatoille
Gay Nicolas
1724-1796 Tassenières Gay Philibert 1725-1761 Le Deschaux
Gay Bénigne
1757-1818 Tassenières Gay Nicolas 1756-1812 Le Deschaux
Gay Pierre Monamy Pierre (1814-1837)
Gay Jean-Pierre
° 16 nov. 1789 x 15 février 1836 ° 16 octobre 1792 Le Deschaux,
+ 18 janvier 1856
Richard Marie-Jeanne + 21 avril 1853
x 30 août 1814 x 15 juillet 1813
Monamy
Marie-Claudine Gateau Marie-Claudine
Gay Claude Monamy
Auguste (1836-1908) Gay Anne
° 4 nov. 1820 x ° 6
octobre 1828
+ 23 juin 1892 Curie Marie-Françoise (1836-1910) +
12 avril 1903
x
14 juin 1849 x 25 nov. 1843
Duvillay Marie Aymé Jean-François
Gay Charles-Henri Aymé Faustin
° 29 septembre 1859 ° 29 avril 1859
+ 16 mai 1924 + 26 nov. 1947
x 18 février 1893 Tassenières
x 18 février 1886 Villers-Robert
Poussot Marie-Philippine Monamy Emma (1863-1904)
Gay René Aymé Marcel
° 31 octobre
1897 + 28 avril 1972
° 29 mars 1902 + 14 octobre 1967
x 19 août 1922
Girardot Marcelle x 16 avril 1931 Arnaud Marie-Antoinette
Duvillay
Claude Gay
Nicolas
x °
28 janvier 1724
Gay Anne +
15 décembre 1796
laboureur à Tassenières
x
9 février 1745
Courcenet
Pierrette ° 28 février 1728 Bretenières
Gay Claudine ° 1747 Gay
Bénigne 1757- 1818
+ 8 février 1802
Tassenières x
x 29 janvier 1765 Gabriel
Pierrette
Duvillay Philibert ° 1732
+ 1er octobre
1804 Tassenières
(cultivateur)
Duvillay Joseph ° 25 mai 1789 Gay Pierre
1789-1856
+ 15 septembre 1859 x
cultivateur à Tassenières Monamy
Marie-Claudine
x 27 novembre 1817
Colladant Claudine
Duvillay Marie Duvillay François Gay Claude
° 7 septembre 1820 ° 23 juillet 1832 ° 4 novembre 1820
+ 25 septembre 1892 + 22 septembre 1918 + 23 juin 1892
x 14 juin 1849 x 21 février 1871
x
Gay Claude Monamy Marie Duvillay Marie
Duvillet
Marie
°
18 avril 1871
+
3 juin 1917
x
22 novembre 1888 Tassenières
Curie
Urbain
Gay Jacques, dit honorable
x Courcenet Etiennette Courcenet Claude
° 20 juin 1637 Dole (frère d’Etiennette)
Ep. Pélissard Clauda
Gay Pierre Gay Philibert, dit le Viel
Gay Nicolas Gay Antoine
x x 13 juin 1719
Gallot Anatoille Digonaux Rémye
Courcenet Dominique, dit le Vieux
x 15 juin 1695
Gissat Denise
Courcenet Nicolas, dit l’Aîné
x 10 janvier 1736 Tassenières
Gay Marie-Françoise (fille de Nicolas
et de Gallot Anatoille)
Gay Anatoille
° 13 septembre 1729 Tassenières
x 13 février 1759
Courcenet Dominique ° 2 avril 1738
+ 12 février 1820 Tassenières
Courcenet Antoine Courcenet Dominique, dit le Fils Courcenet Jean Jacques
x ° 3 octobre 1764 Tassenières ° 19 février 1781 Tassenières
Gay Marguerite + 5 février 1852 Chaussin (39) + 28 avril 1867 Villers-les Bois
x 23 avril 1798 Authumes (71) x 12 juin 1822 Fagot Marie
Guillot Claire (1766-1835)
Courcenet Fabrice Courcenet Marie-Claudine Courcenet Xavière
° 2 mai 1799 Tassenières ° 6 avril 1823 Villers-les-Bois ° vers 1827 Villers-les-Bois
x en 1824 + 5 mai 1900 Bretenières + 4 mai 1849 Tassenières
Fébvre de La Praye x avant 1844 x
Caroline Bertrand Pierre Monamy Dominique
x 29 mai 1850 Bretenières
Gauthron Jean-François
Gauthron Adèle
x 21 février 1878 Bretenières Guyon Jean-François
Août 2003
Ma bibliothèque s’enrichit de nouveaux livres chaque jour, et ce depuis ma rencontre avec Noirphanion, certains ouvrages sont anciens, j’aime les sentir, les caresser avant de les lire. J’ai trouvé chez une amie « Histoire de l’Asie du Sud-Est » de Lê Thanh Khôi, une édition des Presses Universitaires de France, année 1959.
Arthur Aymé (1887-1913), le frère de Marcel, a été reçu au baccalauréat de philosophie à 16 ans, et en 1904 à celui de mathématiques. Après avoir passé avec succès le concours d’entrée à Saint-Cyr, il s’engage en 1907 dans le 4e régiment d’infanterie. Blond aux yeux bleus, il avait le visage ovale d’Emma et possédait sans doute quelques talents littéraires. Il était en effet titulaire d’un prix de dissertation et de version grecque et latine, il récitait souvent des poèmes. Michel Lecureur dans son livre consacré à Marcel Aymé écrit : « il fut tué au Tonkin, six ans plus tard »[11]. Une autre source dit qu’il est mort noyé dans la Sélanong. L’Annam étant sous protectorat français, des militaires y furent envoyés en raison d’une recrudescence des accrochages, des attentats[12]…
Grand-père s’est marié à Salans (Jura) avec Marcelle Girardot le 19 août 1922, la ferme des Girardot qui étaient aussi viticulteurs se trouvait à la lisière de la forêt de Chaux. Avec une superficie de 22 000 hectares, la forêt, située immédiatement à l’est de Dole est le deuxième massif forestier français après la forêt d’Orléans. La forêt de Chaux s’élève à une altitude moyenne de 250 mètres. En plus des cerfs, des chevreuils et des sangliers, on a noté dans cette forêt la présence du sonneur à ventre jaune, un petit crapaud dont les couleurs jaune et noire du ventre sont splendides. Enfant j’ai eu la chance de le voir. Marcelle s’est très vite adaptée à la vie citadine. René était agent SNCF et natif de Besançon, il se rendait fréquemment à Fraisans pour rendre visite à son oncle Armand, ils allaient à la pêche. C’est ainsi qu’il rencontra sa future femme.
Je demandai à
Noirphanion : « - Où en es-tu dans ton roman ?
- Je n’arrive à rien, comme
tout le monde je suis incommodé par la canicule !
- 40° aujourd’hui ! Ta
nouvelle ?
- Le matin j’essaie d’écrire.
J’aimerais avoir le temps comme toi, ne penser qu’à l’écriture ! Et tu
avances ?
- Je suis rentré chez moi en
fin de matinée, après avoir passé quelques jours à la campagne, chez une
amie ; oui, mon essai prend tournure.
Après avoir lu les dernières pages, il me fit la remarque :
- Il est peu question des
œuvres de Marcel Aymé, c’est vrai que c’est l’histoire de ta famille.
- C’est juste, mais j’y viens.
Mon grand-père étant contemporain de Marcel et Suzanne Aymé, il sera un peu
plus question de leurs vécus !
Grand-père René était dans
l’aviation militaire en 1917, il existe un portrait où il pose en uniforme
devant un avion de l’époque, il porte la moustache comme son oncle Armand.
C’est mon frère cadet qui a hérité de la photo encadrée, avec la salle à manger
Henri II … Cette salle à manger, c’est toute une histoire !… et le sabre
impérial de Claude Gay, donc ! Je regrette de n’avoir aucune photo, il
m’aurait plu de mettre celle de René, ou du sabre, dans mes pages…
- Oui, ça aurait rendu encore
plus vivant ton essai … »
René Gay a toujours été très discret sur ses états de service durant la Première Guerre Mondiale. Lorsque je lui posais des questions au sujet de son grand portrait, il me répondait vaguement : « Ce n’était pas facile quand on recevait des pruneaux ! » Il a fallu que je me rende aux archives départementales du Doubs pour avoir une copie de son dossier militaire. René a été soldat au 32e régiment d’aviation en 1917, puis au 2e régiment de bombardement, blessé de guerre, il sera rendu à la vie civile en 1919.
Marcel Aymé avait entrepris des études de mathématiques à Besançon, peut-être se sont-ils croisés dans une rue de la ville, ignorant l’un l’autre qu’ils étaient cousins. C’est en effet en 1919 que Marcel passe son bac. Sur les conseils de sa sœur Suzanne, Marcel Aymé publie en 1926 un premier roman « Brûlebois », trois ans plus tard il obtient le prix Renaudot pour « La Table-aux-Crevés ».
Je disais à Noirphanion que sur le plan historique je reste très pointilleux, vérifiant ce que je trouve comme informations sur le net en relisant divers ouvrages et compulsant mes copies d’actes certifiés conformes etc.
Mariés, mes grands-parents se rendaient à Fraisans chez l’oncle Armand, à Tassenières aussi, chez une tante ( ?), je ne me souviens pas avoir demandé à René ou Marcelle qui elle était ! Ils prenaient le train jusqu’à Mont-sous-Vaudrey, le village de Jules Grévy. « Et puis, en 1914, un jour d’août, je me rappelle, là en face, au bord de la route, les champs étaient tout en moisson, Hector est parti pour la guerre. Il n’avait pas voulu que je l’accompagne au train à Mont-sous-Vaudrey. » (Les chiens de notre vie[13]).
Armand Gay, dit l’oncle de Fraisans, était négociant, marié en 1884 à Marie Vaugier, il n’eut pas de postérité, de ce fait il éprouva un grand attachement à son neveu qui devint mon grand-père. Il décède le 25 janvier 1931, il a été placé dans le caveau familial auprès de son épouse, disparue plus tôt, et de ses parents Claude et Marie Gay.
« La jument verte » paraît en 1933.
Parmi les descendants du couple Jean-François Aymé / Anne Gay autres que Marcel, sa sœur Camille a écrit. Deuxième enfant de Faustin et d’Emma, elle épouse le 7 septembre 1921 à Dole Paul Muster. Enseignante, elle sera aussi auteur de nouvelles, Marcel se battra pour faire éditer ses manuscrits. « L’Abécédaire du jardinier » paraît à Palerme en 1929, d’autres nouvelles sont publiées dans diverses revues sous les pseudonymes de Germaine Marney, Laurence Duparc[14]. Camille avait un frère jumeau, Maurice décédé d’une méningite à l’âge de quatre mois. La seconde guerre mondiale éclate en septembre 1939, le général de Gaulle appelle à la résistance le 18 juin 1940 de Londres.
En 1940, Faustin Aymé transportait dans ses bagages, à 81 ans, au milieu des troupes d’occupation, ses biens les plus précieux, entre autres ses décors maçonniques, et ce au risque d’un contrôle et de se faire arrêter !
C’est à Besançon, au n° 9 de la rue de Pontarlier, dite la cour du 9, qu’habite la famille Gay ; les meubles de la salle à manger sont de style Henri II. Par crainte de l’occupant allemand et suite à l’appel de Londres, grand-mère retira les croix de Lorraine décorant les portes du grand buffet. Grand-père qui avait été modeleur avant d’être agent SNCF put masquer facilement l’emplacement des croix. Les armes étaient réquisitionnées, René enveloppa précieusement le sabre impérial de Claude, alla le cacher dans les WC turcs au fond de la cour, puis, sur la porte de l’appartement ils placardèrent la fonction qu’occupait alors grand-père « employé de la Société Nationale des Chemins de Fer ». Une bombe est tombée dans la cour du 9 sans faire de dégâts chez eux. Moralité : la bombe savait lire !
« Travelingue », le roman de Marcel Aymé, sort en librairie en 1941.
Mon père m’a raconté qu’un jour il croisa de jeunes résistants que les soldats allemands conduisaient à la Citadelle pour y être fusillés. A la libération, papa allait sur sa quinzième année. Le sabre impérial du maréchal des logis Gay retrouva sa place d’honneur dans le séjour. Ce sabre courbé est magnifique, je l’ai eu entre les mains alors qu’il était chez mon oncle Pierre, la poignée garnie d’un aigle protège le dessus de la main.
Camille Aymé-Muster enseigna en Alsace à Bischwiller, en Ardèche, puis se retira avec son mari à Saint-Raphaël, elle s’éteindra le 15 mai 1974.
Mes parents avaient fait construire à Salans dans les années 60, je fréquentais l’école du village, allais voir mon grand-oncle Paul Girardot, héritier de la ferme et du vignoble ; il était employé EDF, je crois … Oncle Paul me racontait qu’enfant il conduisait le cheval borgne dans les vignes, et qu’on appelait son père « Bourbaki » à cause de la guerre de 1870.
[1] Michel Lecureur « Marcel Aymé » édition La manufacture 1988.
[2] Aymé Faustin
[3] Jules Romains « A la recherche d’une Eglise » Les Hommes de Bonne Volonté T.7 Flammarion.
[4] Louis XV (1710-1774) fut déclaré majeur en 1723. La rémission de Philibert fut donc accordée du temps de la Régence de Philippe d’Orléans.
[5] Renée Rivet « Leur encre était violette » édition Librairie Bleue 1995.
[6] Elisée Reclus (1830-1905) géographe français, auteur d’une géographie universelle. Anarchiste, membre de la loge maçonnique La Renaissance.
[7] Marie-Claudine Gay, née Monamy (1788-1855) Tassenières, épouse de Pierre Gay, propriétaire.
[8] « La chaîne d’union » revue d’information maçonnique, n° 1 octobre 1954/1955.
[9] Alain Bauer « Le Grand Orient de France » édition « Que sais-je » année 2002 page 101.
[10] Vénérable : Premier officier de la loge, dont il préside les travaux.
[11] Michel Lecureur « Marcel Aymé » p.19 (op.cit.)
[12] Michel Germain « L’Indochine autrefois » éd. Horvath 1990.
[13] « Les chiens de notre vie » dans « Enjambées », contes de Marcel Aymé, Folio-Gallimard n° 3449, éd. année 2000
[14] Camille Aymé-Muster « Le plateau d’argent » année 1930, nouvelle. Cahier Marcel Aymé n° 21, année 2003, édition SAMA
[17] Nicole de Bonvalot fut le modèle de cette fontaine.
[18] Nicolas de Granvelle : ministre de Charles Quint, né à Ornans en 1486 et décédé à Augsbourg en 1550, conseiller au parlement de Dole en 1518.
[19] La France : La Franche-Comté page 281-305, Guides bleus, Hachette tourisme 2002.
[20] Cahier Marcel Aymé n° 21 page 150 (op.cit.).
[21] Au sujet de l’amitié de Marcel Aymé – Louis-Ferdinand Céline, lire « Le flâneur de la rive gauche » Entretiens Antoine Blondin / Pierre Assouline, éditions François Bourin 1988,
Page 88 Blondin: « - Tous les dimanches, j’allais voir Céline avec Marcel Aymé … »
Page 102 Blondin au sujet de Marcel Aymé : « - Je l’adorais. C’était quelqu’un, ou de très fier, ou de très timide. En fait Marcel Aymé parlait peu, mais il écoutait tout … A sa mort, j’étais son meilleur ami. »
Page 103 « Il aimait l’Homme. Aymé était profondément humain »
C’est une série d’entretiens avec Antoine Blondin, diffusée sur France-culture du 14 au 18 mars 1988 qui est à l’origine du livre « Le flâneur de la rive gauche ». (Ouvrage prêté gracieusement par Noirphanion.)
[22] Céline (Louis-Ferdinand), écrivain (1894-1961), auteur entre autres du Voyage au bout de la nuit. Le 1er juillet 1961 Marcel Aymé veille toute la nuit la dépouille de son ami à Meudon.
[23] Gouillats : creux d’eau en Comtois.
[25] Georges Pompidou (1911-1974) Premier ministre du général de Gaulle à compter du 14 avril 1962 puis Président de la République du 15 juin 1969 à sa mort.
[26] Marcel Aymé « Les contes du chat perché » (Le problème) page 127, Folio n° 343.
[27] Lettre de sœur René-Marcel datée du 30 août 2003.
[28] Frédéric Vitoux « La vie de Céline » page 506, édition Bernard Grasset Paris 1988.
[29] Marcel Aymé « Brûlebois », roman, édition Gallimard.